Le séjour 2022 au Kenya fut riche en avancement !
Pour rappel le projet spiruline au Kenya a été lancé en 2016 et permet de produire 6kg de spiruline séchée par jour grâce au travail professionnel de 5 locaux qui sont salariés de la ferme.
Côté production tout va bien, l’équipe maîtrise désormais parfaitement, et la ferme se porte très bien.
Là où nous avons encore du chemin à parcourir, c’est côté distribution de spiruline (distribution gratuite à but humanitaire). En effet, au Kenya la spiruline est méconnue, et il n’est pas facile de convaincre les institutions d’utiliser la spiruline dans les programmes de lutte contre la malnutrition, ce qui a été bien plus simple pour nous lorsque nous avons voulu en faire autant au Burkina Faso. Cela peut paraître paradoxal mais on souhaite donner gratuitement de la spiruline à des enfants qui en ont cruellement besoin, l’éfficacité a déjà été démontré dans d’autres pays, et n’y arrivons point ! Ou du moins difficilement…
Alors cette année, l’une de nos priorités a été de développer nos canaux de distribution humanitaires mais nous avons aussi été occupés par d’autres types de missions durant notre séjour de 2 mois.
Près de 800 enfants qui reçoivent de la spiruline chaque jour d’école au Kenya
Cette année a été une année importante en matière de distribution car nous avons réussi à relancer un programme qui était tombé à l’eau dans une école primaire, cette fois à priori de façon pérenne; et réussi à en lancer un second dans une autre école proche de notre ferme.
30% des enfants de la région de « Kwale » où nous sommes implantés souffrent de malnutrition selon l’UNICEF et les journaux locaux. Alors à défaut d’arriver à s’insérer dans les milieux médicaux pour cibler précisément ces 30%, nous nous sommes orientés vers des programmes alimentaires à l’école, partant du principe que parmi les 70% restants une grande partie des enfants ne sont peut-être pas malnutris mais souffrent souvent de carences.
Dans les deux écoles citées ci-dessus, nous finançons désormais une collation copieuse type « porridge » contenant de la spiruline.
D’après les gestionnaires de ces écoles, nombreux sont les enfants qui ne mangent pas 3 fois par jour, et cette collation financée par une association est donc une aubaine.
La collation enrichie en spiruline permet non seulement de limiter la faim, mais aussi de combler les carences nutritionnelles dont de nombreux enfants souffrent et qui nuisent à leur développement. Quant au goût de la spiruline qui peut parfois repousser des gens en occident, les enfants ne semblent pas s’en soucier au Burkina Faso comme au Kenya.
L’erreur que nous avions faite en lançant le programme l’année précédente a été d’impliquer le corps enseignant et les enfants mais pas les parents. Au bout de quelques semaines, du fait de la méconnaissance de la spiruline, des parents se sont plaints et ont demandé à ce que la spiruline ne soit plus introduite dans le repas.
Nous avons cette année organisé une rencontre avec les parents, nous leurs avons tout expliqué concernant notre spiruline en nous appuyant sur nos salariés locaux qui parlent le dialecte local et bénéficient de plus de confiance de la part des parents, et leur avons indiqué que les portes de notre ferme étaient toujours ouvertes si jamais leur curiosité les poussait à venir visiter pour en savoir plus.
À l’issue de cette réunion, les parents ont donné leur accord pour relancer la distribution de spiruline, et de notre côté nous nous sommes dit que nous avions été trop pressés et qu’il était en fait évident qu’il aurait falu impliquer les parents.
Dans la deuxième école nous avons donc fait les choses dans un ordre différent, et le 2eme programme sera lancé en avril 2022 au bénéfice de 400 enfants, soit 700 enfants en tout au Kenya qui reçoivent de la spiruline chaque jour.
Installation de panneaux solaires
Une des autres grandes missions menées à bien cette année a été l’installation des panneaux solaires qui ont été subventionnés par l’organisation Energy Assistance.
3 bénévoles de cette organisation sont venus sur place début février 2022 et ont installé les 36 panneaux sur le toit de notre petit centre de formation que nous avions construit en 2021.
Une installation qui rend notre ferme totalement indépendante en éléctricité et qui va permettre d’économiser entre 2000 et 3000€ d’éléctricité par an.
Au delà de l’aspect financier, ces panneaux vont surtout nous permettre de ne plus avoir à subir les coupures de courant intempestives du réseau électrique kényan peu fiable. Notre ferme a été privée plusieurs fois d’éléctricité pendant plusieurs jours, ce qui nuit bien entendu au bon fonctionnement de la ferme et à la production de spiruline. Nous sommes donc ravis de cette installation !
Réalisation d’une vidéo explicative
Cette année nous avons compris qu’il n’était pas toujours facile d’expliquer aux personnes extérieures au projet ce qu’est la spiruline et comment on la cultive. Nous avons donc travaillé à la réalisation d’une courte vidéo explicative. Dès sa publication nous avons réalisé à quel point elle nous était utile, car lors de tous nos rendez-vous institutionnels nous la montrons et les échanges sont tout de suite plus fluides.
Nous avons aussi créé des petits flyers explicatifs en langue anglaise et Swahili, nous avons personnalisé la voiture de la ferme et posé des panneaux directifs aux alentours du village pour donner plus de notoriété au projet « KUGAWANA SPIRULINA ».
Rendez-vous institutionnels
Chaque année lors de nos séjours sur place nous essayons de maximiser les rencontres avec des acteurs influents des domaines du médical, de l’agricole, de l’éducation ou tout autre organisme ayant un pouvoir de décision ou d’influence dans le but de convaincre aux bienfaits de la spiruline face à la malnutrition.
La spiruline a bien des avantages si on la compare aux moyens habituellement utilisés pour lutter contre la malnutrition. En effet, contrairement aux RUTF’s (Ready-to-Use Therapeutic Food), la spiruline a l’avantage d’être un produit naturel et non transformé, pouvant être cultivé par la communauté elle-même sans dépendance à l’occident, et contenant un pourcentage élevé des nutriments qu’on trouve dans les « aliments thérapeutiques prêts à l’emploi ». Mais pour arriver à ce que la spiruline soit plus largement utilisée dans les campagnes de lutte contre la malnutrition, il faut d’abord arriver à faire connaître la spiruline puis à convaincre de ses vertus en matière de malnutrition.
Cette année nous avons pu présenter notre projet à des directeurs d’école primaire comme expliqué plus haut, mais aussi à des nutritionnistes gouvernementaux, au Rotary Club de Mombasa/Malindi, à des médecins chercheurs également producteurs de spiruline, à des journalistes dont un a écrit un bel article nous concernant, à des personnes impliquées dans des projets agricoles au sein des milieux éducatifs auxquels nous croyons énormément, mais aussi à de jeunes agriculteurs motivés par la spiruline et souhaitant s’y former.
Lors des séjours précédents nous nous sommes aussi adressés à la Croix Rouge, au ministère de la santé, au responsable des hôpitaux régionaux et bien d’autres acteurs. Ces rendez-vous sont tour à tour soit très motivants, soit très décevants, avec parfois des personnes mal-intentionnées qui ne s’intéressent qu’à des profits potentiels qu’ils pourraient peut-être réaliser grâce à la spiruline s’ils l’exploitaient à but commercial…
Le tout est de savoir faire le tri et de rester motivés malgré l’avancement très lent qu’on arrive à provoquer.
Incitation au recyclage du plastique et distribution de vêtements
Lors de chacun de nos déplacements en Afrique nous amenons une grande quantité de vêtements collectés en France dans le but de les donner. Depuis 2021, nous demandons aux habitants de nettoyer le village des déchets plastique afin d’amener ces déchets dans la première usine de recyclage de la région en échange de ces vêtements, ce qui fonctionne plutôt bien, et permet aussi de distribuer plus justement ces vêtements.
Nouveau système d’irrigation, plantation d’arbres, rénovation de la serre et de deux bassins
Dans notre ferme de spiruline kényane nous cultivons également du Moringa. Comme la spiruline, le Moringa est considéré comme un superaliment qui se marie très bien avec la spiruline car elle contient entre autres la vitamine C que la spiruline ne contient pas. Il s’agit d’un arbre dont on peut tout manger : tronc, branches, feuilles, racines. On l’appelle aussi « Magic Tree ».
Malheureusement l’année 2021 fut une année extrêmement sèche pour le Kénya tout entier, ce qui a eu, pour beaucoup de petits agriculteurs, des conséquences désastreuses. Puisque peu nombreux sont ceux qui peuvent se payer des systèmes d’irrigation.
Nous avons nous aussi perdu pas mal de plantations en 2021 et avons décidé de financer un système d’irrigation type « goutte à goutte » pour faciliter l’arrosage des plantations à notre équipe sur une partie de notre parcelle. Nous avons aussi planté une bonne quantité de nouveaux arbres.
L’année 2021 a aussi été une année très venteuse, au point que la couverture de notre serre a cédé, nous avons donc fait intervenir une société pour rénover notre serre. Enfin nous avons vidé, nettoyé, et réparé les deux premiers bassins que nous avions construit en 2015.
Programme de parrainge à l’école secondaire
Depuis maintenant 3 ans nous sommes l’intermédiaire entre de jeunes kényans et des « parrains » européens qui financent leur scolarité en école secondaire. Ces enfants âgés de 12 à 20 ans, ont pu aller en école primaire parce qu’elle est quasiment gratuite au Kenya, mais ont dû ensuite abandonner leur études faute d’argent. Grâce aux sponsors que nous avons trouvé en Europe, ces enfants continuent d’être scolarisés ou ont pu retourner sur les bancs de l’école après une ou plusieurs années de coupure.
Au cours de notre séjour nous avons rencontré à deux reprises les jeunes, avec et sans les parents, pour refaire le point sur les conditions du parrainage, car certains adolescents n’avaient, selon la principale, pas le comportement adéquat (absentéisme, peu de progrès). Nous avons donc tenté de les remotiver et de leur rappeler leur chance.
Pour d’autres tout se passe comme il se doit, et certains sont même venus à notre rencontre pour solliciter notre aide pour des projets universitaires futurs.
Comptabilité, ressources humaines, gestion de projet, communication
Lors de chacun de nos séjours nous réalisons aussi les tâches courantes de gestion de l’association. En effet il faut s’occuper de la vérification et la digitalisation de la comptabilté, organiser les futurs stages de personnes venant se former dans notre ferme à la culture de spiruline (nous avons lancé un centre de formation à la culture de spiruline en 2021), organiser les plannings et les vacances de nos salariés, décider des avantages, primes et revalorisations éventuelles de salaire, mettre à jour notre site web à destination de l’Europe, gérer de l’administratif comme par exemple la sécurité sociale de nos salariés… Et bien plus !
Et au Burkina Faso ?
L’équipe de bénévoles de Secteur10 se rend au moins une fois par an sur les lieux des fermes établies.
Pour rappel Secteur10 gère depuis 2008 un projet spiruline au Burkina Faso, et depuis 2016 un projet au Kenya. Jusqu’ici, se rendre chaque année sur place ne pose aucun problème au Kenya, alors que nous déplorons de n’avoir pas pu nous rendre au Burkina Faso depuis 2019.
La situation géopolitique est telle, qu’il est formellement déconseillé de se rendre dans le Nord du Burkina Faso, et étant donné que notre projet se situe à la frontière du Mali, nous avons fait le choix de ne pas mettre nos vies en danger pour nous rendre sur place (de nombreux attentats ont eu lieu au Burkina Faso ces deux dernières années et les occidentaux sont parfois pris en otage).
Bien heureusement, grâce au travail passionné de nos collaborateurs locaux, notre projet spiruline burkinabé continue de tourner malgré notre absence, et 1500 enfants reçoivent chaque midi un repas contenant du riz, des légumineuses et une cuillère de spiruline.
Nous rencontrons tout de même un problème de taille, du fait de la sécheresse, notre puits à la ferme est à sec, alors que nous avons besoin d’eau pour cultiver et récolter la spiruline. Nous devons donc soit approfondir notre puits si c’est techniquement possible, soit financer un autre forage plus profond.
Perspectives 2022/2023
La résolution du problème d’eau au Burkina Faso est notre première priorité, la sécheresse est extrême, puisqu’en 15 ans de présence au Burkina Faso, c’est la première fois que notre puits est à sec.
Nous attendons actuellement des devis et cherchons des financements pour résoudre ce problème au plus vite en réalisant un forage plus profond.
Une fois que ce problème sera résolu, nous voudrions également construire un ou deux bassins de culture supplémentaires au Burkina Faso pour être sûrs d’être en mesure de produire assez de spiruline pour tous les enfants de l’école car c’est déjà un peu juste.
L’effectif continue d’augmenter du fait des enfants maliens réfugiés qui quittent leur pays et viennent s’ajouter aux nombreux enfants déjà scolarisés.
Un autre objectif que nous nous sommes fixés, est de venir en aide aux écoles primaires qu’on parraine autant au Burkina Faso qu’au Kenya. En effet, dans les 4 écoles primaires qu’on parraine, les conditions sont archaïques : manque de mobilier, manque de lumière, pas d’électricité, cuisines et toilettes précaires etc.
Nous avons déjà donné des coups de pouce financiers à ces écoles par le passé mais nous aimerions en faire plus. La première grande mission qu’on aimerait réaliser en ce sens, serait de trouver un parrain pour des panneaux solaires à l’école primaire du Burkina Faso, en effet, dès qu’il y a du vent (ce qui arrive souvent dans le Sahel), le corps enseignant se voit contraint de fermer les volets et les enfants étudient dans le noir ou presque. L’arrivée de l’électricité serait un grand changement pour eux.